L’an dernier, nous avons été témoins d’un large mouvement de soutien en faveur de l’équité. Partout dans le monde, des gens se sont mobilisés contre le racisme et pour l’égalité des genres. Les entreprises ont répondu à ces appels par des engagements à intégrer davantage la diversité dans leurs objectifs et leur image de marque. C’est un pas dans la bonne direction, mais la véritable égalité n’est pas une image de marque. Les discours émaillés de bonnes intentions, c’est de la poudre aux yeux. Nous avons besoin d’une transformation culturelle en profondeur.
Dépasser les cibles
Le conseil pour l’inclusion et la diversité de la Banque Nationale, dont je suis membre, a constaté que l’établissement de cibles de représentation de la diversité présente de nombreux avantages. Comme pour tout autre volet des affaires, l’atteinte des cibles fournit des données de référence et des indicateurs servant à mesurer la réussite de l’entreprise. En se dotant d’un programme d’embauche conforme à la Loi sur l’équité en matière d’emploi, les entreprises peuvent atteindre leurs cibles de diversité et, de surcroît, déployer des pratiques ESG durables. Cependant, la véritable transformation dépasse le simple établissement d’objectifs. Toute initiative de diversité doit être accompagnée de mesures d’inclusion. Et c’est, à mon avis, la grande difficulté : comment traiter ses employés équitablement, se libérer autant que possible des préjugés inconscients pour comprendre les besoins qui leur sont propres? Comment les aider à progresser au sein de l’organisation? L’inclusivité passe impérativement par une culture bienveillante.
Pour susciter un véritable changement et promouvoir l’innovation et la diversité des idées, la motivation de l’entreprise doit être authentique. Il faut s’attaquer au problème par sincère conviction, par désir de rendre le monde meilleur. Et c’est aux niveaux hiérarchiques supérieurs qu’il incombe de lancer le mouvement, d’encourager l’ensemble du personnel à créer des liens. N’oublions pas que la diversité a plusieurs visages : elle englobe les genres, la culture, l’expertise, les forces et l’expérience professionnelle. La création de liens étroits entre toutes ces sphères renforce l’innovation et la capacité d’adaptation de l’entreprise.
Entreprendre un avenir plus inclusif maintenant.
Montrer l’exemple
Les discours ont certes une force de persuasion, mais il faut joindre le geste à la parole. L’inclusivité repose sur l’empathie, l’humilité et le respect. Elle exige de revoir la structure des réunions et des équipes, de réfléchir aux mesures qu’il est possible de mettre en place pour s’adapter aux besoins parfois complexes des employés. J’estime que la réussite d’un employé ne se mesure pas seulement à l’aune de ses résultats financiers ou de son esprit d’équipe. Il faut aussi évaluer son adhésion à la culture de bienveillance. Ne pourrait-on pas reconnaître et promouvoir les personnes qui incarnent ces valeurs?
La promotion d’une culture d’inclusivité nécessite des actions concrètes qu’il n’est pas toujours facile de déterminer. Une formation sur les préjugés inconscients est un bon point de départ. Toutefois, des mesures isolées n’ont que peu d’efficacité; elles sensibilisent sur le moment, puis on n’y pense plus. Je recommande vivement aux entreprises d’intégrer l’inclusivité à la racine même du processus de recrutement. Les CV anonymes et les entrevues par des comités de sélection diversifiés ne sont efficaces que si le bassin de candidats est lui-même suffisamment diversifié.
La priorité doit donc aller à la rétention et à la promotion du personnel recruté provenant de différents horizons. Il faut pour cela être à l’écoute des employés et leur offrir toute la flexibilité possible, comme des services de garde d’enfants ou le télétravail. Le mentorat joue également un rôle prépondérant dans une culture d’entreprise qui favorise l’avancement professionnel d’un personnel diversifié. J’ai notamment été le mentor d’une jeune femme noire, et nos conversations ont été aussi enrichissantes pour moi que pour elle. La culture de bienveillance est intimement liée à l’expérience personnelle et a peu à voir avec les chiffres. Elle tend vers l’équité et ouvre grand les portes pour stimuler la créativité et l’innovation de manière inattendue.
Aller encore plus loin
Une approche renouvelée de la diversité et de l’inclusion a des retombées qui vont bien au-delà de la culture d’entreprise. Un employé qui se sent valorisé par la culture d’entreprise, dont on écoute les idées et qui s’investit dans l’amélioration des produits ou des services travaille plus fort, mais surtout, travaille mieux. Et si l’ensemble du personnel est uni derrière le même objectif, l’entreprise a l’agilité et l’empathie nécessaires pour mieux répondre aux besoins de ses clients.
Une organisation plus inclusive est mieux à même de comprendre les besoins divers de ses clients et de leur proposer des solutions adaptées à leur réalité. Et c’est là toute l’importance des relations communautaires. Prenons un exemple : l’Inde, où vivent de nombreux membres de ma famille, est dévastée par la COVID-19 depuis quelque temps. La pénurie de vaccins a fait exploser le nombre de décès. Une entreprise ayant un personnel diversifié saura mieux réagir à une telle crise et venir en aide à des populations à l’autre bout du monde. C’est ce genre d’idées qui stimule la croissance d’une entreprise, et c’est le genre d’entreprise qui attire les candidats tout autant que les clients.
Un avenir prometteur
Un mouvement s’est mis en marche en faveur de l’équité, et j’ai bon espoir qu’il changera le monde. J’imagine un avenir où les cibles n’ont plus d’importance, parce que l’inclusion et l’équité sont profondément ancrées dans les mentalités et la culture d’entreprise. Considérons cela sur le plan personnel : la plupart d’entre nous passons une grande partie de notre temps au travail. Un environnement de travail insatisfaisant cause un stress considérable, que bon nombre ramènent à la maison. C’est mon cas et, je l’admets, après une journée de travail particulièrement éprouvante, je ne suis ni un bon mari, ni un bon père. À l’inverse, si ma journée a été productive, agréable et une grande source de satisfaction, je rentre à la maison l’esprit léger et ma famille s’en porte bien mieux.
Nous avons besoin d’un changement radical, qui profite non seulement à notre personnel et à nos clients, mais à la société tout entière. Car un employé heureux au travail, qui se sent valorisé pour ce qu’il fait, a une plus belle influence sur le monde qui l’entoure. Imaginez si c’était le cas de tous les employés… l’effet papillon transformerait la société pour le plus grand bonheur de tous.