Nous pouvons tous faire mieux pour protéger nos aînés contre l’exploitation financière

11 juin 2021 par Simon Lemay
Protéger les seniors de l’abus et l’exploitation financière

Par Simon Lemay, premier vice-président et directeur national chez Financière Banque Nationale – Gestion de patrimoine

Vu le vieillissement de la population au Canada, la prévention de la fraude et de l’exploitation financières contre la clientèle aînée demeure une priorité pour notre industrie. La vigilance dans la gestion financière de nos clients vulnérables est importante pour les aînés et leurs proches, notre secteur et notre société. Comment les institutions et les organismes de réglementation peuvent-ils contribuer à la protection de nos aînés?

Appuyer l’autonomie des aînés

L’autonomie des aînés est un enjeu qui reste d’actualité. Nous avons tous été confrontés au moins une fois à une demande inhabituelle d’un client plus âgé ou d’un membre de sa famille. En plus du fait qu’il ne soit pas toujours évident de détecter un cas de fraude ou d’exploitation chez une personne vulnérable, c’est aussi souvent une situation délicate à gérer.

D’un côté, le maintien du pouvoir décisionnel des aînés doit rester une priorité. Même si certains d’entre eux peuvent avoir besoin d’aide, cela ne veut pas nécessairement dire qu’ils doivent renoncer au processus de prise de décision. De l’autre, nous devons, au mieux de nos capacités, protéger les aînés contre les pertes financières en cas d’exploitation. Ils ont souvent un horizon de placement plus court pour récupérer ces pertes et un profil d’investissement généralement plus conservateur.

Il est de la responsabilité du conseiller de fournir toute l’information nécessaire pour favoriser une prise de décision éclairée. Le conseiller doit aussi écouter et répondre aux inquiétudes de ses clients. Ces derniers auront l’esprit en paix, sachant qu’ils peuvent lui faire confiance.

Entreprendre un avenir durable maintenant.

Collaborer avec les proches

Communiquer ouvertement avec les clients et leurs proches, en ayant leur consentement, sur les enjeux et les risques éventuels liés au vieillissement et établir un plan de protection contre une fraude ou une exploitation financière peuvent éviter des situations délicates et possiblement des conflits familiaux. 

En plus d’une procuration ou d’un mandat en cas d’inaptitude, pourquoi ne pas envisager de recommander fortement l’utilisation d’une autorisation écrite permettant au conseiller de communiquer avec une tierce partie de confiance pour gérer les situations plus complexes? Cela ajouterait à la protection de nos clients, même de ceux qui ne désirent pas déléguer leur pouvoir décisionnel sur leurs actifs. 

Ces démarches comportent plusieurs avantages. Non seulement elles peuvent contribuer à renforcer la relation avec le client, mais elles peuvent aussi permettre de bâtir un lien de confiance solide avec plusieurs personnes clés dans l’entourage de ce dernier. 

Idées pour contribuer encore mieux 

L’intérêt des clients doit demeurer la priorité pour nous tous. À ce titre, il existe maintenant des mécanismes permettant aux conseillers et aux institutions de refuser d’exécuter des instructions ou de signaler les situations d’exploitation potentielles, même en cas de transfert du client vers une autre institution. 

Cela dit, tout en restant à l’intérieur des balises réglementaires, le partage d’informations entre les institutions pourrait être amélioré. C’est justement là où nous pourrions en faire plus. Mettre au jour les situations d’exploitation ne suffit pas; nous devons aussi les signaler adéquatement. Nous pouvons aussi inviter les autorités de réglementation et les législateurs à permettre aux institutions de s’échanger plus d’informations dans un cas d’exploitation financière. Cela aurait l’avantage de mieux protéger nos aînés. 

Les autorités de réglementation font un bon travail pour discipliner les contrevenants réglementaires, mais qu’en est-il des auteurs des exploitations? Plusieurs autorités de réglementation provinciales, comme les Autorités canadiennes en valeurs mobilières, et organismes d’autoréglementation, comme l’Organisme canadien de réglementation des investissements (OCRI) et le Fonds canadien de protection des investisseurs (FCPI), ont fait diverses propositions, mais ces changements devront aussi protéger les conseillers qui agissent dans l’intérêt de leurs clients (safe harbour). À l’extérieur du pays, d’autres réglementations existent et mériteraient d’être étudiées, dont le Senior Safe Act de nos voisins du sud.

Sensibiliser le grand public

Nous sommes tous d’accord, les cas d’exploitation d’aînés sont encore trop nombreux. Nous nous devons d’en faire plus dans l’éducation du public, et cette responsabilité ne doit pas être limitée au secteur financier. Des clients mieux informés évoluent vers une plus grande autonomie et sont mieux habilités à détecter eux-mêmes la fraude et l’exploitation financières. C’est d’autant plus pertinent sachant que ces délits sont souvent perpétrés par des membres de la famille immédiate ou des proches aidants.  

Nous devons donc continuer d’encourager les échanges et la communication ouverte pour déceler les fraudes et les exploitations chez les aînés ou les personnes vulnérables. Conseillers, c’est à nous de continuer à être vigilants, à développer des relations de confiance avec nos clients et leurs proches ainsi qu’à prendre toutes les précautions pour prévenir les délits potentiels. 

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